« Pourquoi veux-tu partir ? Reste dormir avec moi, juste dormir, promis… »
Et la marmotte… Déjà, je n’avais nullement l’intention de rester aussi longtemps et puis tu as décidément trop bu, cher Clint.
Lundi 15 mars 2021 # BIENTÔT LE PRINTEMPS ??? J-7
Sitôt rentrée de chez Toto hier midi, je me suis préparée pour mon date. C’était chouette, ce petit frisson de se faire belle pour une rencontre avec somme toute un inconnu. Ça faisait longtemps et cela m’a permise de me resituer question séduction, Bradley mis à part.
Au bout de la première heure, je me suis demandée ce que je foutais là. Mais il avait acheté un super vin et je n’avais rien d’autre à faire alors je suis restée encore un peu, quand bien même impatiente qu’il soit 17.00 afin de m’éclipser pile poil pour le couvre-feu.
Dans les grandes lignes, Clint est un homme-enfant archi-couvé par sa mère qu’il adule – en gros, aucune femme ne peut être à sa hauteur – un enfant gâté qui a l’habitude d’obtenir ce qu’il désire en claquant des doigts. Hé ho, je ne suis pas une Playstation donc on se calme.
Il a aussi un historique familial assez lourd qui l’a nourri de complexes en tout genre avec un énorme besoin d’exorciser. Un ultra-émotif hypocondriaque et parano qui s’est construit une carapace de dur à cuire pour cacher ses émotions qui souvent l’emportent au-delà de toute raison.
Quand j’ai touché sa nuque, j’ai senti un courant froid, presque glacial mais très souple et louvoyant, un peu comme le gulfstream. Ou la mort qui rôde autour de lui.
Yep. Pas très appétissant, tout ça. Cela dit, j’ai apprécié sa lucidité, sa franchise et sa capacité à se livrer sans détours. Mais bon.
Et pis la tête qu’il a fait lorsque, au cours de la conversation qui a glissé bien entendu vers nos relations amoureuses respectives passées, je lui ai dit que mes dernières relations sexuelles avec Bradley avaient été sans préservatif… L’hypocondriaque en lui a fait des bonds :
« Comment as-tu pu coucher avec des mecs sans protection ?!?! »
Déjà, c’était pas ‘des mecs’ mais un seul à la suite de trois ans de jachère donc si j’avais attrapé le sida, je le saurais. Bref, ça m’a confortée dans le fait qu’entre lui et moi, rien ne se passerait. J’étais d’ailleurs presque sur le point d’attraper mon sac et mon manteau lorsque de façon inattendue, le ton a changé et il est devenu subitement intéressant.
Moins autocentré, il s’est enfin réellement intéressé à moi, à ce que j’avais à dire et je dois reconnaître, il m’a surprise. Kickboxer, DJ, musicien, grand voyageur… Enfin, des choses intéressantes à discuter !
Ce que l’on a fait. Une chose menant à une autre, on s’est embrassés. Et c’était bien. Du coup, quand j’ai regardé l’heure, le couvre-feu m’est alors apparu comme une notion abstraite. Mais pas l’intention pour autant de passer la nuit là.
Surtout qu’au bout de la troisième bouteille de vin, il a commencé bah à être bourré et à agir en tant que tel. Pas dans l’agressivité mais dans le bizarroïde et le forcing. Plusieurs fois, je lui ai bien stipulé que je n’avais absolument pas envie de coucher avec lui en remettant ses mains baladeuses à leur place.
Moi, j’ai bu aussi mais sagement. Pas envie de me mettre minable avec un inconnu, je sais très bien que je l’aurais regretté. Donc, parfaitement lucide, j’ai finalement attrapé mes affaires et je suis partie.
Le métro ne me tentait pas, ni le taxi qui me tendait les bras alors je suis rentrée à pied. Six bons kilomètres en plein air, ça permet de réfléchir. Ça tue les pieds aussi, quand on ne porte pas de Nike.
Donc, fière de moi, je me suis sentie. Fière d’avoir su déterminer ce que je voulais et ne voulais pas et de m’y être tenue. Et contente. Car malgré tout, j’ai passé un bon moment. Et pas un instant, je n’ai eu de soupçon de spleen ou de bad trip.
Mon ‘cahier des charges’ a été rempli : rencontrer, échanger, être confrontée à autre chose, ne pas être dans le calcul et vivre les choses comme je les sens. Et j’avoue, les baisers échangés ce soir étaient délicieux !
Va-t-on se revoir lui et moi ? Je ne sais pas encore, on va se reparler c’est sûr, ensuite, bah on verra. Ah tiens, maintenant que j’y pense, il ressemble beaucoup à Walter. Physiquement déjà, la même morphologie, les mêmes fringues, peut-être pas la même classe que Walter mais la ressemblance est indéniable. Breton expatrié comme lui, la même éducation catho, les mêmes valeurs familiales et patrimoniales, les mêmes expressions parfois…
Cela ne me trouble pas plus que ça car je ne fais pas de transfert, je sais très bien que ce n’est pas Walter. Juste une coïncidence.
Le nouage d’une relation amoureuse n’est pas une finalité pour moi mais une éventualité. Je suis très heureuse d’avoir fait cette démarche d’inscription sur Meetic, je vais continuer et peut-être faire d’autres rencontres. Qui pourront être du même acabit, peut-être pas, mais mon but est de me sortir de moi, d’aller au devant des autres et de savoir qui je suis.
Bilan de l’opération : un bon moment qui m’a vraiment changé les idées et une confiance en moi et mon potentiel de séduction retrouvée, après ces longs mois, ces longues années à penser que j’étais un cas désespéré, une indésirable au sens propre du terme, une paria. Que du positif, quoi.
Bon, j’ai aussi gagné dans l’affaire une légion d’ampoules sur mes pieds dont une aussi large que le cratère du Yucatan. Le prix à payer, au final pas si cher que ça, pour se mettre les idées au clair.