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UNE BAFFE AU FOIE GRAS

–  Tu m’as demandé une salade périgourdine, je t’ai fait une salade périgourdine. Mais je ne pouvais pas acheter seulement quatre tranches de magret fumé, dix grammes de foie gras et deux gésiers confits donc il y a des restes. Alors, j’ai pensé te faire un sandwich pour le trajet jusqu’à l’armée, qu’en penses-tu ?

–  Bah j’aime pas les sandwiches au foie gras…

Et pan dans ma tronche. J’aurais dû lui coller dans la sienne avec la facture samedi soir.

 

Lundi 5 juillet 2021 # DECONFINEMENT LIBERTAD !  J+16

Mais que c’est chouette d’être seule ! Dès que j’ai eu déposé Bradley à son régiment hier matin, j’ai poussé un grand soupir de soulagement derrière le volant de ma Clio. Une sensation de liberté. Independence Day.

Je suis rentrée guillerette faire mon ménage puis glander sur mon canapé tout neuf que je n’ai pas beaucoup squatté depuis que je l’ai reçu. Je crois que je n’ai jamais autant apprécié vivre seule. Je vais reprendre ma petite routine, faire mes bidules comme je l’entends et n’avoir personne d’autre que moi à prendre en compte. Ni à rendre compte.

Je réalise que de le savoir loin pour quelques temps me fait penser à lui de manière plus conciliante. J’étais à cran, en may-day perpétuel depuis un mois sans pouvoir reprendre mon souffle ni prendre le recul nécessaire pour penser objectivement.

Ce qui m’amène à la conclusion évidente : je ne suis décidément pas faite pour une vie à deux. J’étouffe, j’ai besoin de pauses. Une histoire sérieuse, pourquoi pas, mais pas 24/24. Surtout avec un gougnafier comme peut l’être Bradley.

Déjà, on verra à son retour lors de notre semaine de vacances s’il fait les efforts qu’il m’a promis. Et a fortiori sur tout le mois d’août, que l’on est censés passer ensemble avec ses enfants… J’appréhende un peu. Chat échaudé craint l’eau, dit-on.

D’où le caractère primordial de ces trois semaines pour moi toute seule. Et comme au boulot ça s’est un peu calmé, j’ai vraiment l’impression d’être en vacances.

Je savoure.

LAST CHANCE

“Des bulles légères et pétillantes. C’est ça que je veux dans ma vie, tout ça et rien d’autre que ça. »

Moi mardi soir, bien campée sur mes ergots dans le duel façon western qui m’a opposée à Bradley. Car la veille au soir, j’ai senti qu’il fallait que je livre mon dernier combat. A la vie, à la mort. De notre histoire.

 

Vendredi 2 juillet 2021 # DECONFINEMENT LIBERTAD !  J+13

–  Bon, j’annule ma semaine de vacances auprès de Shannon ou pas ?

–  Pourquoi ?

–  Bah d’une, toi et moi n’avons plus une tune et de deux, si je dois annuler c’est maintenant or never.

–  Je t’ai dit, laisse-moi le temps de faire mes comptes.

–  Non, pour une fois, faisons les choses selon quelqu’un d’autre que toi. Je ne peux pas attendre.

–  Bah j’en sais rien ! Et toi, quel budget as-tu, hein ?

–  J’aurais mis comme toi. Pour la parité.

–  Elle est facile, celle-là ! Quelle parité ?

–  Celle que tu m’as foutue dans la tronche hier soir.

–  Ah bah parlons-en d’hier soir justement !

–  Pour une fois, on est d’accord. Je commence.

J’ai respiré un grand coup et j’ai enchaîné.

–  Que tu vomisses partout dans le salon parce que tu étais bourré comme un coing, peu importe, j’aurais même pu trouver ça marrant. Mais la moindre des choses est de t’excuser, non ?

–  Je l’ai fait ! Encore une fois, tu ne m’as pas écouté, donc pour la seconde fois et je te regarde dans les yeux quand je te le dis : je m’excuse !

–  Je devrais enregistrer nos dialogues de sourdingues, tu serais surpris. Bref, moi je ne m’excuserai pas d’un truc pour lequel je n’ai pas à m’excuser.

–  Bah crois-moi, je vais te garder un chien de ma chienne ! Tu t’es arrogée le droit de me faire cracher au bassinet en contrepartie de tout ce que tu m’a donné jusqu’à aujourd’hui ?! Ce n’est pas pour le montant que j’aurais réglé de toute façon mais pour le principe : tu commandes des planches parce que tu as faim puis tu te casses sans un mot, tu nous plantes en terrasse en nous laissant l’addition ! J’ai trouvé cela très cavalier de ta part !

–  J’avais trois grammes, j’ai rien calculé, c’est tout !

–  C’est bien ce que je dis : tu as trouvé ‘normal’ que je paye pour toi. Alors qu’on s’était dit le matin même qu’il fallait limiter les dépenses ! Tu t’es dit que je devais raquer parce que je te devais bien ça ?!

–  Je ne me suis rien dit du tout, j’étais soûle, point-barre !!

–  Peu importe, ton attitude m’a choqué, voire blessé et j’attends que tu t’en excuses. Moi, je l’ai fait deux si ce n’est trois fois alors à ton tour !

–  Mais va te faire voir !!! Quand bien même j’aurais eu en tête de te faire ‘cracher au bassinet’ comme tu dis, je ne te savais pas si mesquin ! Je t’héberge, je te prête ma voiture, je te nourris, je nourris tes enfants quand ils sont là…

–  Je ne savais pas que je devais te rémunérer.

–  Hé je ne suis pas ta catin, fais gaffe ! Je l’ai fait de bon gré sans attendre quoique ce soit en retour. J’ai beaucoup de défauts mais certainement pas le manque de générosité.

–  C’était peut-être inconscient chez toi alors mais je l’ai mal pris quand même. Je te signale que je remplis le frigo quand je peux, j’ai acheté de l’huile et des bougies pour ta voiture, je mets de l’essence…

–  C’est toi qui t’en sers !

–  Ce que je veux dire, c’est que je participe à égale mesure. D’autre part, je te rappelle que c’est moi qui t’ai invitée le week-end dernier alors que je viens d’acheter une maison, que j’ai plein de travaux qui coûtent la peau du cul, qu’il y a les vacances avec les enfants à prévoir et que je viens de lâcher 5.000 balles pour faire réparer mon Dodge !

–  Moi, ça fait un an que je suis au RSA, que je vis sur ma pelote qui a disparu depuis longtemps déjà, que je suis criblée de dettes, que j’ai un salaire qui couvre à peine mes charges fixes et je ne me plains pas.

–  Tu fais ce que tu veux avec ton oseille, moi je fais attention, c’est tout.

–  Et le bon plan, c’est de vivre à mes crochets ?

–  Quoi ?! C’est plutôt moi qui devrais dire ça ! « Le mec vient de toucher 100 patates en indemnités de licenciement, c’est le moment d’en profiter. »

–  C’est ce que tu penses de moi ? Une bimbo vénale ?! Tu veux que je ressorte toutes les factures de bouffe, d’alcool, de Deliveroo et du lit que je t’ai donné ?!

–  Et moi, tu veux que je ressorte mes notes d’essence et de parking pour venir te voir ?!

–  On en est là… Dieu que c’est pathétique !

Petite pause entre deux rounds, à bout de souffle tous les deux. Il reprend après une cigarette.

–  Tu me prêtes des intentions, des mots qui ne sont pas les miens. Tu as des œillères, tu interprètes comme ça t’arrange et tu me vois de travers.

–  C’est bizarre, je pense la même chose à ton égard. J’ajouterais que je ne connais personne qui a autant de mauvaise foi que toi. Et vire ton téléphone pendant qu’on parle, c’est un manque de respect que je n’accepte plus. Tu sauves des vies, tu sauves le monde ?!

–  Ça devient compliqué entre nous…

–  Au contraire ! Au début, on pensait que certaines choses allaient peut-être poser problème entre nous mais vois-tu, je n’ai pas de problème avec ton armée, je n’ai pas de problème avec tes enfants, je n’ai pas de problème avec le fait que tu achètes une maison à 300 bornes et que l’on se verra de temps en temps, c’est avec toi que j’ai un problème. Tu ne te rends pas compte de la façon dont tu me traites, dont tu me parles, tu fais un délire de persécution me concernant, c’est terrible ! Y-a-t-il des choses d’il y a 20 ans dont tu me tiens rigueur ?

–  Non.

–  Interroge-toi, sérieux. En tout cas, moi l’enfer, j’ai donné et je n’en veux plus. J’arrive à un âge et à un tournant de ma vie où je ne veux vivre que des bonnes choses en toute sérénité. Je n’ai aucune responsabilité, personne d’autre que moi-même à penser avec encore quelques belles années devant moi qu’il est hors de question de gâcher.

–  Moi aussi je veux ça.

–  Bah ce ne sera pas avec moi, vu comme c’est parti.

–  Allez, vas-y, je sens que tu as envie de vider ton sac. Ce sera peut-être salutaire.

Alors, j’ai vidé ma malle-cabine. Mon container. Fini d’essayer de lui dire les choses par lettre ou par mail, j’ai tout déballé. De façon étonnamment posée, qui plus est. Je lui ai déclamé sans ciller mon cahier de doléances, en gros, ce que j’écris dans ce blog à son sujet comme un défouloir.

Il a semblé tomber des nues. Il a tenté de répliquer sur un ou deux trucs mais j’ai eu vite fait de le rabrouer comme il le fait avec moi, en lui pointant que c’était justement une des choses que je n’acceptais plus désormais.

–  Et la cerise sur le pompon de la cerise, c’est la raison à mon – je te cite – ‘manque de libido dernièrement’. Je me suis confiée à toi un soir, je t’ai dit ce qui m’était arrivé et les traumas que je trimballais encore aujourd’hui et toi, tu fais exactement ce avec quoi j’ai du mal ! Tu m’as même prise de force !

–  Non, ce n’est pas vrai !!! Tu ne t’es pas débattue ?

–  Je t’ai même dit stop.

Il était atterré. Consterné.

–  Je commençais tout juste à vouloir refaire confiance à un homme mais depuis ce soir-là, bah je me méfie de toi. C’est pour cela que je ne peux pas me lâcher. Je n’ai plus confiance.

–  Oh non ! Pas ça ! Je suis tellement désolé !

Il a paru horrifié, véritablement choqué par mes révélations. Je ne me suis pas appesantie, je suis allée droit à la conclusion.

–  Des bulles légères et pétillantes, c’est tout ce que je veux dans ma vie. Rien d’autre. Je ne veux plus que tu me parles comme à un chien, que tu me cries dessus, que tu me manques de respect, que tu me traites comme une moins que rien. Je ne veux plus que tu me manipules en étant un jour démon et ange le lendemain. Donc, si tu ne t’en sens pas capable, si tu ne peux pas faire ces efforts pour aller dans mon sens, autant en rester là.

–  Et toi, tu as fait des efforts pour essayer de me comprendre ?

–  J’en ai fait plus que je n’aurais dû. Ce n’est plus à moi de les faire.

–  Bon, alors oui, je vais faire de mon mieux. Et toi, continue les efforts que tu faisais et si cela peut te rassurer, on ne refera l’amour que lorsque tu auras de nouveau confiance en moi.

–  Tu essayes de reprendre la main, là. Que les choses soient claires : c’est notre dernière chance.

–  A ce point-là ?…

–  Pour moi, oui. Je ne referai pas la même que lorsqu’on a divorcé il y a 20 ans.

 

Le lendemain, mise en pratique de nos bonnes résolutions. En terrasse au Q.G. avec Connor et son associée, j’ai fait l’effort d’y rester dîner alors que j’avais envie d’autre chose que des sempiternels frites-fromage – Connor, en voilà un autre de despote, généreux certes mais ne souffrant qu’on le contredise – surtout que j’avais encore la planche mixte de lundi au travers de la gorge.

Mais je les ai quittés vers 22.30 car j’étais fatiguée, j’avais froid et besoin de me retrouver seule. Je leur ai dit de monter s’ils le voulaient pour le digeo, j’ai jeté un billet de 50 sur la table alors que Bradley me disait qu’il m’invitait et je suis rentrée.

Le lendemain matin, Bradley m’a demandé gentiment pourquoi j’étais partie aussi soudainement, pensant que je n’avais pas passé une bonne soirée. Je lui ai expliqué calmement, il a semblé comprendre et accepter. Il m’a quand même balancé que Connor l’avait mal pris et que mon attitude était parfois bizarre, même quand on me connaissait.

« Etre soi-même, c’est bien ce que tu prônes, non ? Bah je suis moi-même et je me fous de savoir ce qu’on en pense, Connor le premier. »

 

Et aujourd’hui, on a booké nos vacances. Le cahier des charges de Bradley était ‘soleil et pas cher’, le mien était ‘un endroit que ni l’un ni l’autre ne connaît’. Ce sera donc Collonges-La-Rouge en Corrèze.

Depuis notre grande explication de mardi, je dois reconnaître que Bradley a changé. C’est pratiquement le jour et la nuit. Il fait des efforts également pour ne pas repiquer dans ses travers et je ne me gêne plus pour le remettre à sa place dès qu’il frôle l’ignominie.

Ça l’a fait réfléchir aussi. Et il s’est enfin ouvert à moi sincèrement. Je pense que j’ai alors compris beaucoup de choses à son sujet, lui aussi du coup. Même si cela ne lui servira pas de justificatif à mes yeux.

« Tu disais que je suis dans la vie comme je suis à l’armée, que je suis au combat non-stop, que je vis comme en temps de guerre, c’est vrai. La parano, le qui-vive, l’agressivité, c’est une déformation professionnelle mais pas que. Je suis comme ça depuis que je suis tout petit, j’ai appris à me débrouiller seul à l’âge de 10 ans, à ne pas faire confiance et être toujours prêt à affronter le pire. Je ne me sens en sécurité nulle part. Je ne sais pas être autrement. J’ai l’impression de trimballer un sac sur le dos, que je ne peux pas, que je n’ai pas le droit de poser… »

Je le comprends et je le plains, vraiment. Mais je ne veux pas en payer les pots cassés, pas deux fois dans la même vie, non.

 

Dimanche, il part pour ses trois semaines à l’armée. J’ai hâte.

Besoin urgent de me retrouver avec moi-même.

Poiré & Champignons

« Vous êtes sûre qu’on vous a administré le vaccin Covid ? Parce que pour moi, l’aiguille était minuscule et je n’ai rien senti ! » que me sort Shannon ce matin lorsque je lui raconte ma primo-vaccination hier à la Médecine du travail du Louvre.

Bah chépa, moi c’était une aiguille pour cheval et j’ai purée eu mal sa race. Pourtant, je ne suis pas douillette. L’impression qu’on m’a forée le biceps gauche.

 

 Jeudi 24 juin 2021 # DECONFINEMENT LIBERTAD !  J+5

Juste avant de me piquer, la docteure Mme De R. De B. (à se demander ce qu’elle fout à la Médecine du travail avec un patronyme pareil) me file au moins trois attestations de consentement et une feuille A4 d’effets secondaires éventuels avec comme seule recommandation : « Veuillez consulter votre médecin traitant ou appeler le 15 si les effets ne se dissipent pas en quelques jours. »

VACCINS COVID-19 Moderna et Pfizer – QUE FAIRE EN CAS D’EFFETS INDESIRABLES ?

 

Vous ressentez ou vous avez eu :

–          Une douleur/démangeaison au point d’injection

–          De la fatigue

–          Des maux de tête

–          Des douleurs articulaires/musculaires

–          Des frissons

–          De la fièvre

–          Des nausées, des vomissements

–          Une douleur aux extrémités (mains, pieds) (hahaha what else ?!)

–          L’apparition de ganglions

–          Des insomnies

–          Des malaises

–          Une paralysie faciale

J’lui dis ou j’lui dis pas ? Qu’à part les ganglions et la paralysie faciale, c’est mon lot quotidien ? Aussi, quand elle me rappelle pour prendre des nouvelles, je lui dis que tout va bien. Sinon, elle va m’envoyer le SAMU.

Non, honnêtement, ça va. Un léger tournis dans l’heure qui a suivi mais rien dont je n’ai l’habitude, alcoolisée ou pas. Et comme c’était au Louvre donc pas loin des bureaux de Walter, j’ai envoyé un texto à ce dernier vendredi pour une sorte de date.

Mais à 17.10 hier au métro Louvre-Rivoli, bah y avait personne. Un lapin. Sans aucun message avant ni après. Ça m’arrange d’une certaine façon. Ça me conforte et ça m’attriste également. De constater que les choses ne changeront jamais entre lui et moi mais que malgré tout, il peut me rester un embryon d’espoir à torpiller une énième fois.

Bref, du coup, en sortant du métro vers chez moi, j’ai sifflé Yang qui est descendu dare-dare pour aller happy-hourer au Bistro de la Ferme, histoire d’avoir une bonne raison pour mon tournis. Comme lui ce n’est pas la fête en ce moment avec Mimine et idem pour moi avec Bradley depuis quelques jours, ça nous donnait à tous les deux une légitimité à se noyer dans notre pinte de blonde.

Yep, Bradley est on ne peut plus odieux depuis lundi. Au point que je remette en question notre week-end – le fameux ! – qui doit être une sorte de pèlerinage de… notre voyage de noces d’il y a 23 ans ! Pas aussi glamour que Venise mais symboliquement important vu que c’est lui qui l’a suggéré. Et réservé. Et réglé. Un soir quand il avait 3 grammes à la terrasse en-dessous.

Mais symbolique ou pas, si c’est pour qu’il soit aussi odieux qu’il l’est ici, je ne vois pas l’intérêt.

D’ailleurs, ce matin dans la voiture, ça n’a pas loupé. Je le sais désormais, il est imbuvable la plupart de la journée mais spécialement le matin. Mais pour une fois, bah moi aussi. Effet secondaire du vaccin Covid non-listé, la susceptibilité ?…

Bref, arrête de me parler comme à une sous-merde décérébrée, je ne suis pas une poupée qui doit fermer sa gueule devant son maître, je ne suis plus ta femme et à peine ta petite amie, je n’ai donc pas à supporter tes insultes plus longtemps. Oui, c’est de ma faute, c’est moi qui ne comprends rien, qui suis bouchée à l’émeri et qui te cherche des poux dans la tête. Allez, stop.

Là-dessus, j’ai bondi hors de la voiture à l’arrêt dans les bouchons et j’ai continué clopin-clopant jusqu’à mon boulot. Furax. Pourtant, je suis patiente. Me suis attendue à ce qu’il me relance par sms mais rien. J’ai alors envisagé que je rentrerais ce soir et qu’il aurait pris la poudre d’escampette.

Mais à 17.28 : « Je viens te chercher ou tu fais encore la tête ? »  Je me suis surprise à lui répondre que j’apprécierais qu’il vienne me chercher. J’ai vraiment zéro rancune, quelle mièvre je fais. J’avoue. Cela aura servi de test pour savoir si cela me ferait quelque chose si nous deux ça s’arrêtait et force est de constater que oui.

Cependant, sachant que les limites de ma patience viennent d’être frôlées de près, je ne peux qu’être sur mes gardes et m’attendre à tout. Donc, bien drapée dans un manteau de méfiance, je suis montée en voiture sans un mot autre que des banalités sur ma journée de boulot. A lui de revenir sur le sujet.

D’un ton doux et chaud, il m’a alors invitée à prendre un verre à son Q.G. aka la terrasse d’en-dessous. Là, bien installés sur notre tonneau Lillet, on s’est mis à parler. Lui, surtout. Une vraie douche écossaise, ce Bradley : un jour ours mutique, le lendemain pipelette façon bonimenteur. Je lui ai même dit d’arrêter de faire son show de Dir Com, que sa méthode Winner n’avait que peu d’effets sur moi.

Mais je le reconnais, il sait y faire. Parce que je le veux bien, aussi. Ainsi, il s’est excusé à sa façon, on s’est expliqué et les choses ont pu être assainies. J’avais raison, cela dit, d’être réservée à l’idée de devenir son ‘employée’ donc mon petit job d’appoint, ce n’est pas plus mal qu’il tombe à l’eau. Jamais je ne m’asservirai pour quelques euros et une tonne d’emmerdes par mois.

Bon, au final, on a passé une bonne soirée. « On se fout sur la tronche mais on s’aime, c’est ce qui compte, non ? » La messe est dite, alea jacta est.

D’aucuns diraient qu’il ne connaît pas sa chance celui-là d’être avec une femme plus patiente qu’un ange et aussi peu encline à la vengeance. Du coup, on part bien en week-end demain. Notre premier week-end ! Une sorte de test-drive, que je lui ai dit, pour voir comment l’on est en configuration ‘amoureux’ pendant deux jours loin de Paris.

Je ne sais pas pourquoi mais j’ai un pressentiment étrange…

 

Lundi 28 juin 2021 # DECONFINEMENT LIBERTAD !  J+9

« Ton week-end peut-il être aussi non-romantique que le mien ? »

Texto désespéré à Yang samedi midi. Apparemment, oui. Chouette.

Pourtant, le cadre était là… Hôtel 4 étoiles, un manoir au milieu de la forêt d’une beauté à couper le souffle, une chambre sublime et 48 heures devant nous pour roucouler tout notre soûl. Mais je me suis vite rendue compte que le week-end en amoureux où l’on laisse le quotidien au placard téléphone éteint, n’était qu’un concept purement abstrait donc fumeux pour Bradley : celui-ci est exactement le même et se comporte de la même façon qu’il soit à Paris ou à Honolulu.

Ah si, son concept à lui d’un week-end détente (ce qui n’augure rien de bon pour les vacances) :

–  On se lève quand on se lève et on se recouche après le petit-déjeuner. Sans être obligé de courir partout. Je n’aime pas qu’on m’impose un rythme, je veux faire ce qui me plaît, c’est-à-dire rien.

–  Et je suis censée faire quoi moi, pendant que tu bulles ?

–  Ce que tu veux.

–  C’est ton concept d’un week-end à deux ? Chacun dans son coin ?

–  Euh…

–  Parce que ça coûte moins cher de rester à buller à Paris que dans un 4 étoiles, quoi.

Fin prête pour une (demi) journée à découvrir le coin, sans speed, en musardant, je me suis trouvée bien dépitée à 11.00 en constatant qu’il s’était rendormi tout au fond du lit king-size. J’ai pourtant été conciliante en prenant en compte ses propos de la veille et le fait de ne pas le brusquer au saut du lit.

Je l’ai donc réveillé doucement pour aller déjeuner à 9.45 alors que moi j’étais réveillé depuis une bonne heure. Il s’est exécuté en maugréant, se pointant dans la salle de petit-déj les lunettes de soleil vissées sur le nez sans le moindre sourire, à qui que ce soit d’ailleurs, à la limite de la rustrerie. Il a même fait un mini-scandale à la serveuse parce qu’il n’y avait pas d’œufs brouillés au buffet… Bref, une fois remonté dans la chambre, il a filé sous la couette en bougonnant.

La moutarde m’ait alors montée au nez, je l’ai secoué sans ménagement. Pensant même, en cas d’ultime échec, à prendre mes cliques et mes claques pour rentrer sur Paris où j’aurais l’air moins con, abandonnée comme un caniche sur une aire d’autoroute.

Mais miracle : il s’est levé sans trop regimber, il s’est fait une toilette de chat et l’on a pu quitter l’hôtel sur le coup de midi. Je lui ai quand même glissé que si moi je me pliais à lui la plupart du temps, serait-il capable lui de se plier à moi de temps à autres ?… Une réponse en queue de sucette que je n’ai pas relevée car j’avais espoir de sauver le reste du week-end.

Grand bien m’en a pris.

La suite s’est déroulée comme un charme. Une jolie visite d’un domaine cidricole, une balade alentours entre deux averses et clou du week-end : un dîner gastronomique au restaurant étoilé de l’hôtel. Un moment féérique. Avec toutes mes allergies alimentaires qui me privent de la plupart de la grande gastronomie française, je n’avais plus espoir de vivre un jour un tel voyage culinaire.

Du très grand art. Divin. Magique. Pour moi comme pour Bradley. Pour une fois, nous étions à l’unisson.

Nous sommes repartis hier midi sur un petit nuage. Cela n’a hélas pas duré. Sitôt rentré, Bradley s’est mis à éplucher ses mails de l’armée, à invectiver ses sous-fifres, à me commenter toutes les news catastrophiques que l’on avait manquées, à m’envoyer balader lorsque je lui ai demandé de l’aide pour aller vider les cadavres de bouteilles qui s’entassent, sans manquer bien sûr de :

–  Je t’ai dit que je n’avais pas faim, pourquoi tu m’as fait une assiette ?! Tu n’en fais qu’à ta tête, il faut que cela marche comme toi tu l’entends !

–  C’est la poêle qui se fout du chaudron ! Tu la mangeras plus tard, ce n’est pas grave, si ?

–  Oui mais tu vas faire la tête parce que tu as mangé toute seule, parce que je ne t’ai pas prêté attention…

–  WOW !!! Stop, pour qui tu me prends ?! Une bimbo ?! Mange ou ne mange pas, je m’en fous !

–  Tu dis ça mais tu n’en penses pas moins…

–  T*** G*** !!!

On fait mieux comme fin de week-end. Et ce matin, le voilà tout stress en vue de son départ le week-end prochain pour son stage de trois semaines à l’armée. Tout ça parce que je souhaite récupérer ma voiture après un mois et demi de prêt gracieux, que son Dodge n’est toujours pas réparé, que personne ne peut lui prêter une voiture et qu’il n’a pas les moyens – après ce week-end dispendieux qu’il a lui-même réservé – de louer une caisse sur trois semaines.

Devant son numéro de Caliméro, je lui suggère, si tant est qu’il ne termine pas trop tard son truc à l’armée samedi, de l’emmener le soir même, nuit à l’hôtel là-bas et je rentre en début d’aprem le dimanche donc. Mais à ses frais, quand même, non mais. Bref, 700 bornes aller-retour pour qu’il arrête de s’apitoyer sur son sort et de me soutirer de l’aide sans jamais me la demander directement.

Que nenni. Il me répond « Bah ça ne résoud pas le problème du retour le 24 juillet… » je lui ai donc fait le coup du « Je dois te laisser, j’ai des appels ! » et hop j’ai raccroché. Et j’ai ajouté cela à la liste de ses dernières infâmies à mon encontre.

Bon. Philosophe, je me dis qu’il ne reste plus que quelques jours avant ce break salvateur. Je choisis donc de rester sur la good vibe de cet endroit merveilleux où malgré la compagnie rugueuse de ce goujat de punk de Bradley, j’ai renoué avec la quintessence du bonheur au naturel.

LA BEQUILLE

« Va donc, hé chauffard ! Tu vois pas que j’ai une béquille ?!?! » que je vocifère au gros 4X4 Merco qui manque de m’écrabouiller sur le passage piétons.

Aucune compassion, ces bobos parisiens qui votent Hidalgo et son zéro-voiture dans Paris mais qui roulent en V8 passé le périph… De toute façon, béquille ou pas, s’il m’avait écrasée, il était en tort à 3000%.

 

Mercredi 16 juin 2021 # DECONFINEMENT JUSQU’A 23.00  J+8

Mais pas le temps de maugréer plus que ça, je claudique dare-dare au taf qui n’arrête pas depuis deux semaines. Boss n°2 m’appelle même le soir sur mon portable perso ! Je ne sais plus où donner de la tête tellement j’ai de dossiers en cours et pas de formation pour les traiter…

Les filles sont débordées et font ce qu’elles peuvent pour me former entre deux beuglements de Boss n°2 « TOUT LE MONDE DANS MON BUREAU, URGENCE TOP PRIORITAIRE !!! » mais la Bichette-Andrea, remontée comme un coucou suisse, ne veut rien savoir. Elle me fait penser à un pitbull idiot (pléonasme). Mais bon, j’ai assez de self-control mais surtout plein d’Euphytose dans le baigneur pour ne pas l’envoyer paître à force épithètes grossiers à la Capitaine Haddock.

Bref, plus le temps de quoique ce soit de perso, comme d’écrire ce blog. Le soir et les week-ends, ce n’est pas mieux, question temps libre. Depuis que Bradley est à demeure, en fait. Pas de son fait et je ne lui veux pas mais mes petits temps de bullage rien qu’à moi me manquent un peu.

Là, c’est ma pause-déj que je ne passe pas pour une fois à traiter les urgences que je n’ai pas pu traiter le matin à cause des urgences de la veille… Allez, je tente le style télégraphique, au cas où.

*** BREAKING NEWS *** Port du masque en extérieur : fini demain/Couvre-feu : fini dimanche… Juste au moment où j’ai décidé de me faire vacciner. Mais vu que j’ai des allergies sévères à plein de trucs, faut que j’aille en centre de vaccination à Perpète-lès-Oies au planning surchargé, donc c’est pas pour demain.

Déménagement de Bradley le 5 juin : check. Petit foot avec l’un de ses fils en attendant les bras pour décharger le camion avec grand écart facial pour arrêter le ballon qui m’a déchiré le nerf inguinal, le crural et les ligaments du même nom. D’où la béquille gentiment prêtée par Nénette. Vive l’ibuprofène.

Maison aux pommes : check. C’est un petit Eden d’arbres fruitiers, de prairies mellifères et de potagers conservatoires. Paradisiaque. J’aurai énormément de plaisir à y venir de temps à autres. Mais ce n’est pas chez moi. Et je ne pense pas que cela le soit un jour. Je suis bien où je suis comme je suis.

Dodge Colorado de Bradley en vrac : check. Et donc taxage de ma Clio en attendant les réparations. Je n’en ai pas besoin donc je m’en fous. Mais Môssieur bougonne lorsque je lui dis que j’en ai juste besoin pour aller signer la succession de Maman samedi, quel toupet ! Bah oui, ça l’oblige à louer une bagnole pour aller lui et ses enfants voir son père, budget pas prévu blablabla… Excuse-moi d’avoir besoin des sous de Maman vu la tronche de mon compte bancaire après un an au RSA.

Job d’appoint pour mettre du beurre dans les épinards : check. Connor, le pote de Bradley, a besoin d’une assistante commerciale à mi-temps mais non-déclarée pour ne pas payer de charges et non-rémunérée en cash car il n’en a pas. Moi, je refuse tout net d’ouvrir mon auto-entreprise, rien que de penser à l’immat au RCS, j’en ai la nausée, en bonne traumatisée de l’entreprenariat que je suis. Eventuellement, j’accepte d’être payée en Cesu mais partiellement parce que mes impôts… Bref, le casse-tête.

J’ai donc sans vergogne filé le bébé au spécialiste des montages juridico-administratifs scabreux aka Bradley. Qui, semble-t-il, va devenir mon ‘employeur’… Un nouveau lien qui me rattache à lui. Du coup, je ne sais pas si cela me convient ou pas. Certes, j’ai grand besoin de cette tune en plus par mois, une somme pas négligeable, notamment pour mettre de côté en vue de rembourser ma dette perso sans que la banque ne le sache, mais cela vaut-il ce lien de subordination avec quelqu’un avec lequel je ne suis pas sûre encore de m’engager ?…

Attitude/humeur de Bradley depuis le 6 juin changeante comme le ciel en Normandie avec une tendance maussade voire orageuse les sept premiers jours : check. Me sauter à la gorge à la moindre occasion n’est vraiment pas la bonne méthode pour obtenir mes faveurs. Comme on dit : on n’attire pas les mouches avec du vinaigre. Je ne sais pas trop ce qu’il cherche à provoquer, en fait.

Bref, cela m’a franchement soûlée, au point de lui dire d’aller se faire cuire un œuf. J’en ai parlé à BFF Yang qui, dans sa sagesse extrême digne de Master Yoda, m’a dit d’attendre de voir en septembre lorsque le nouveau rythme de notre histoire démarrera.

Yep c’est vrai, je peux endurer jusqu’à début juillet, ensuite il part trois semaines sous les drapeaux et après c’est les vacances. Quel jugement plein de bon sens, ce BFF, et pas un pète d’impétuosité aux conséquences éventuellement désastreuses ! Une vocation de JAF peut-être…

Et comme par miracle, le soir même, Bradley est redevenu un ange. Comme s’il avait senti ma mutinerie éclater. Et je dois dire que depuis, c’est idyllique. Je profite donc sans demander mon reste.

Come-back de Walter : check. Je lui ai dit « All in or all out ». Nénette m’a demandé ce que je ferais si demain il était en bas de chez moi avec ses valises… Je n’en sais rien en fait, je verrais sur place (d’où le quitte ou double) car je ne fonctionne plus dans l’expectative, j’avise sur le moment. Sachant qu’il y a une chance sur un million qu’il tente le tout pour le tout, je ne prends pas beaucoup de risques.

Cela ne m’empêche pas d’y penser : check. J’imagine la scène : Walter en bas de chez moi, Bradley dans le salon et moi pantoise le portable dans les mains… J’essaye surtout de savoir ce que je ferais : dire à Walter que c’est trop tard ou dire à Bradley que je ne l’aime pas assez pour continuer avec lui (comme son ex lui a dit en rompant – un schéma réitératif sur lequel il devrait peut-être s’interroger) ?…

Bref, chépa et honnêtement, j’m’en fous. Autruche time.

GOAT ANTI-MOUSE

« Vous pouvez considérer que vous faites définitivement partie de l’équipe, je ne renouvelle pas votre période d’essai. Le démarrage a été un peu lent mais c’est normal au départ, le temps de prendre connaissance du fonctionnement de l’entreprise et des produits. Les formations Gescom et Appels d’Offres vous permettront de remplir les périodes creuses des premiers mois. Bienvenue ! »

Seulement là, je ne peux même pas bosser dessus tellement le Commercial et le Marketing me soûlent ! Elle plane un peu, Shannon.

Mercredi 2 juin 2021 # DECONFINEMENT EN DEMI-JAUGE  J+15

On ne m’a jamais autant sollicitée que depuis que j’ai envoyé ce mail disant que je n’étais pas dispo. La prochaine fois, je mets un Buffer sur mes mails entrants et un autre, un gros, sur mon bureau car on vient me démarcher jusque-là. Tout en top priorité à rendre hier, bien sûr. S’ils savaient où ils peuvent se la coller, leur ‘goat anti-mouse’

Je ne sais pas si cela coïncide avec ma fin de période d’essai hier mais je trouve que je suis un peu trop la star du moment, j’aimerais qu’on m’oublie un peu. Je vais finir par faire de la merde et j’aime pas du tout ça.

Bref. Aujourd’hui, c’est l’anniv de Maman. Elle aurait eu 89 ans. J’évite de repenser au 2 juin de l’an dernier car je sens les larmes monter. C’était le premier rendez-vous avec la directrice de l’EHPAD vers chez Toto. La première fois aussi depuis le début du confinement que je reprenais la route.

J’avais donc hurlé à plein poumons dans la Clio sur Five Finger Death Punch, fait une razzia dans le cerisier de Toto et étais revenue le soir même dans mon appart surchauffé en ce début de canicule en rêvant de climat arctique.

J’avais surtout plein d’espoir pour Maman, même si je pressentais déjà la mauvaise nouvelle qui allait nous tomber dessus dix jours plus tard.

Dimanche dernier, en lisant les spams d’Interflora et les posts Facebook du style « Bonne fête à toutes les mamans », j’ai eu envie de jeter ma box internet par la fenêtre. Quelques larmes au cimetière aussi la veille lors d’un crochet sur la route du retour en camion avec Bradley.

Bon allez, j’arrête. Je m’en retourne à mes CKmb, procalcitonin et Ntpro-BNP. Le mal de crâne que je me colle rien qu’à leur énoncé suffit à me changer les idées.

JE NE SUIS PAS UN POULPE

  1. Formation stats vendredi & lundi. (j’peux pas, les filles, désolée)
  2. Veille AO et formation Gescom. (itou)
  3. Manufacturing Flowchart à refaire from scratch avec traduction en français. (ma pause-déj, je m’assois dessus, donc)
  4. Vous pouvez me détailler le contenu des 3 énormes cartons de composants qui viennent d’arriver ? (à vue de nez y en a 10.000, je vais y passer la nuit)
  5. Faudrait que tu tries les emails de cette boîte partagée sinon tu vas te retrouver sous l’eau. (357 en 12 heures, je bois déjà la tasse)
  6. Tu t’es occupée des dernières réclamations clients ? (nope, j’y vais j’y vais)
  7. Nouvelle stratégie commerciale : vous êtes mon bras armé, vous allez centraliser et logisticiser tout ça sous 15 jours. (avec une Bichette-Andrea qui me répond que c’est pas son boulot d’établir un fichier-clients alors qu’elle est Dir Com, je suis pas sortie de l’auberge)

On avait dit ‘étoffer mon poste’, pas me bourrer comme une dinde de Thanksgiving !!!

Lundi 31 mai 2021 # DECONFINEMENT EN DEMI-JAUGE  J+13

Donc, ce matin, j’envoie le mail qui va bien : « La priorité n°1 étant cette opération commerciale, je mets en stand-by le reste car je ne suis pas un poulpe. » relayé par mon boss qui trouve que c’est une bonne idée d’avertir ses collègues pour qu’ils s’organisent en fonction.

Bref, comment passer du peignage d’ongulé artiodactyle à la course effrénée 8h/jour 5j/7… Bah, dans la douleur. Surtout en ce moment où mon agenda perso est lui aussi ultra-chargé. Semaine et week-end derniers à fond les ballons grâce à Bradley et sa première phase de déménagement. Et d’emménagement chez moi pour un mois.

Entre les apéro-terrasse en bas où il est désormais connu comme le loup blanc – en  tout cas bien plus que moi en 10 ans à habiter juste au-dessus – les afters, la réservation de notre week-end fin juin, l’aller-retour samedi à sa maison aux pommes que j’ai enfin pu découvrir, le déjeuner avec Toto venu donner un coup de main à décharger, un apéro-terrasse-militaire suivi d’un after chez Bibi en rentrant, une livraison de canap dimanche matin suivi d’un brunch avec Connor le meilleur pote de Bradley et une bonne peignée entre nous deux juste avant qu’il ne reparte chercher ses enfants pour leur dernière semaine dans son appart, bah je suis à bout de souffle.

Et cette semaine s’annonce à peine moins surbookée : ce soir, petit débriefing autour d’une bière avec Yang, mardi ou mercredi barbecue chez Connor, jeudi apéro-écriture avec Yang et vendredi la phase 2 du branle-bas de combat qui se terminera dimanche soir.

Rien que d’y penser, je suis crevée. J’aime le mouvement, le survoltage, les agendas remplis au chausse-pied et les impromptus en tout genre et après un an à faire de la Wii toute seule dans mon salon comme seul entertainment, je peux dire que je suis gâtée aujourd’hui mais quand même.

Cela mériterait d’aller dans le détail mais le livreur DHL m’a plombé mon aprem : « Ah non, je ne me casse pas le dos à vous monter ce colis monstrueux » J’ai senti l’embrouille, surtout quand boss n°2 m’a dit : « Il faut trier par numéros de lot et faire des petits cartons à réexpédier. »

Une heure plus tard, bien décidée à terminer ce post, je me rassieds et là, je reçois ce mail :

« A tous, Pour rappel, nous tournons la suite de la vidéo demain. Boss n°4 : boss n°2 souhaiterait que la toile rétroéclairée soit positionnée à l’entrée (en bas des escaliers), est-ce que c’est possible pour toi de la déplacer demain matin stp ?

Cameron : comme convenu, nous aurions besoin que tu joues la cliente en pharmacie. Pourrais-tu stp venir demain pour 9h15 à la pharmacie Bastille, 3 bd Beaumarchais ?

Bichette : on aura besoin de jouer quelques scénettes de mise en situation en entreprise, peut-on compter sur toi ?

Boss n°1 et boss n°2 : pourriez-vous svp prévoir des tests type test salivaire, autres tests cassettes… à disposer sur la table de réunion lors de la réunion de « Conception » ?

Pour rappel :

  • 9h-10h30 > Tournage à la Pharmacie Bastille (3 bd Beaumarchais)
  • 11h-15h30 > Tournage dans nos locaux
  • 16h-17h30 > Tournage au laboratoire D.

Merci. »

Elle est rigolote, la p’tite pépée du marketing. Du coup, je meurs.

PIC-VERT DANS MON CRÂNE*

« Je vous informe que Mademoiselle Pouêt Pouêt ne reviendra pas. Comme vous nous l’avez demandé à plusieurs reprises, votre poste va s’étoffer très bientôt. »

Shannon il y a 10 minutes. Bon, fini, la bulle. Quoique vendredi et ce matin, j’étais plutôt en mode busy-bee. J’attends donc de voir ce que cela donnera quand je serai une abeille surbookée sous cocaïne.

Mardi 25 mai 2021 # DECONFINEMENT EN DEMI-JAUGE  J+7

Dimanche, un pique-nique de salon sur fond de salsa-merengue haut en couleurs, c’est le moins que l’on puisse dire. Yang et Mimine en couple comme au bon vieux temps, Abigaïl aussi délicieuse que les bonbons qu’elle n’a pas manqué de me réclamer, Timothy tout en jambes à me faire virevolter sur de la salsa ultra-caliente – faut que je me remette au sport, j’ai plus de souffle – et la venue-surprise de Bradley avec ses garçons pour les fraises melba de la fin de repas.

Attablés tous alors en vrac dans les rires, la boustifaille partagée à la pointe du couteau, un grand moment de convivialité a fleuri spontanément. Je me rends compte à quel point j’aime ces grandes tablées où la bonne chère se partage sans chichis dans la bonne humeur.

J’aime être dans la cuisine à pied d’œuvre en pyjama les cheveux en pétard dès 8.00 du mat, j’aime me pomponner une fois tout préparé et accueillir mes invités en diva de brunch, j’aime le bazar indescriptible sur la table en fin de repas que l’on pousse sur le côté pour installer un jeu de société…

J’aime être l’hôtesse aux petits soins, celle qui reçoit, celle qui anime, celle qui, sur son frigo, aimante avec émerveillement le cinquième dessin au Bic censé représenter une licorne-libellule, celle qui se retrouve seule ensuite avec une montagne de vaisselle qu’elle se met à faire sans rechigner, un air béat de contentement et certainement l’air de Girls Just Wanna Have Fun encore vissé dans le crâne…

Une vraie pub pour les lave-vaisselles Bosch.

Oui, j’adore recevoir. C’était d’ailleurs ma seule raison pour monter ce restaurant. Ça me manque, qui plus est après plus d’un an de crise sanitaire où tout rassemblement était, sinon banni, ascétique et aseptisé.

J’adore, même si c’est crevant. Je m’en remets à peine, là.

Et Bradley a été très agréable dimanche. A l’aise, la conversation facile avec tous les hôtes présents. Très ‘je marque mon territoire’ cependant, à faire le café et les œufs brouillés comme le maître de maison qu’il n’était pas, ce qui a bien fait rire Yang.

Agréable oui, sauf quand il s’est caché de ses enfants pour m’embrasser. Tu crois qu’ils sont aveugles, sourds et débiles ? Bref, ça m’a soulée trois secondes puis je m’en suis battu l’œil. Laisse-moi dans ton placard tant que ça te chante mais ne viens pas te plaindre que je ne me projette pas avec toi.

Également, pas très agréable lorsqu’ils sont restés, lui et ses garçons, à manger des burgers et à jouer au Kem’s avec une hôtesse de maison un peu fanée. Il était en bisbille avec l’un de ses fils qu’il trouve beaucoup trop insolent et a donc passé son temps à le houspiller. V’là l’atmosphère légère et rieuse…

En fait, j’ai l’impression que tout est une épreuve avec lui, avec des règles bien établies, les siennes bien sûr, auxquelles il ne faut pas déroger d’un iota sous peine de passer sur la roue des supplices pour avoir commis un crime de lèse-majesté.

La moindre chose comme une conversation anodine se transforme en joute verbale puis en pugilat pour avoir osé lui couper la parole, ne serait-ce que par un timide ‘mais…’. Ou comme un Pouilleux Massacreur qui devient un brief de camp d’instructions pour délinquants juvéniles.

On peut tous avoir des moments à cran où l’on balance sans motif des missiles sur la tronche du moindre interlocuteur, ça arrive. Mais quand c’est H24, je pense que l’on peut dire que l’on est exécrable par nature, non ? Et ça, ça commence à me courir sur le haricot.

Moi qui fais de chaque occasion une célébration, qui veux donner un air de fête à chaque évènement, tout insignifiant et infime soit-il, c’est dur de composer avec quelqu’un qui fait de l’aboiement son langage quotidien.

C’est un tueur de joie, un annihilateur d’arc-en-ciel, un briseur de bulles de savon.

Mercredi 26 mai 2021 # DECONFINEMENT EN DEMI-JAUGE  J+8

Hier, après nos invectives téléphoniques et ma furieuse envie de lui claquer le beignet, Bradley est venu me chercher à la sortie du boulot. Je m’étais préparée à un deuxième round les poings hauts et le répondant gonflé à bloc mais encore une fois, il m’a prise de court en étant l’homme parfait, mon prince charmant.

Et comme j’ai la rancune d’un poisson rouge, j’étais aux anges. Même si je lève le doigt pour parler, maintenant…. Bref, happy-hour à la terrasse d’en bas, petit dîner préparé à l’avance, investissement de ses ‘quartiers’ pour de bon, et ces mots tendrement susurrés :

« Je viens d’officialiser pour nous auprès de mes enfants, de mon père et de ma sœur. »

La soirée aurait pu être romantique jusqu’au bout mais elle a en fait pris une tournure des plus inattendues, ce dont je me suis réjouie comme une môme qui voit débarquer Mickey à son anniv.

Une des army buddies de Bradley était justement en train de boire un verre à la terrasse d’en bas, en repérage d’un bar pour l’apéro-mili de samedi.

–  Hé mais je suis juste au-dessus ! Chérie, ça le fait pas si je l’invite à monter, si ?

–  Ça ne me pose aucun problème ! Juste, je suis en pyj.

–  Quand même, c’est une soirée romantique à la base…

–  Vas-y, invite-la et moi je vois si Yang veut venir lui aussi pour noyer son chagrin de n’avoir pas su réparer son vélo…

Et tout ce petit monde-là a bu, pogoté et fait des pompes sur les quintaux jusqu’à… bah je ne me souviens plus. Mais d’envoyer bouler mon réveil ce matin m’a indiqué que je ne devais avoir qu’une poignée d’heures de sommeil dans le coco. Et la gueule de bois sévère qui m’est tombée sur le paletot m’a confirmé qu’il faut décidément que j’arrête de picoler… en semaine.

Car à 8.48 ce matin, Shannon m’est tombée sur le poil direct à mon arrivée. Elle a commencé à me parler chinois avec l’ordi récupéré de Mademoiselle Pouêt Pouêt dans les mains, du coup : « Laissez tout sur mon bureau, je vais m’en débrouiller. » (d’abord, je vais cuver un peu et récupérer quelques neurones)

J’essaye de me rappeler de ces 24 heures passées, surtout des 12 dernières. Peine perdue. Je sais que c’était intense, haut en émotions mais je vais attendre de faire une bonne nuit de sommeil avant d’infuser tout ça.

Un coup d’œil dans le miroir des toilettes au boulot : vive le Perfecteur de Teint de Guerlain à 31 balles les 15ml.

PIQUE-NIQUE A CUBA

« M’sieurs-dames, il est bientôt 22.00, il va falloir rentrer chez vous ! »

Z’avaient pas dit 21.00 ?… Bref, bon courage pour déloger vos soiffards, bien avinés à en juger par leurs braillements qui n’ont pas baissé d’un ton depuis 18.00.

Jeudi 20 mai 2021 # DECONFINEMENT EN DEMI-JAUGE  J+2

La terrasse du resto en bas de chez moi hier soir. Un quart d’exaspération dans les soupirs que j’ai poussés en fermant mes fenêtres, un quart de nostalgie en repensant au silence religieux du confinement mais au final, une bonne moitié d’indulgence teintée de réjouissance car moi aussi, je vais happy-hourer ce soir en terrasse avec Yang.

J’ai même eu de la compassion pour ces pauvres restaurateurs et bistrotiers qui ont sorti leur terrasse hier matin dans une fringance bien compréhensible et qui se sont pris des draches par intermittence toute la journée. Ça m’a faite penser à mon ancien restau, comment moi j’aurais géré le truc… Avec beaucoup de stress, à n’en pas douter. Je suis donc bien contente de n’être plus qu’une consommatrice.

 

Au boulot, c’est de nouveau la loose. Mais là, ça tombe bien, j’ai plein de trucs perso à faire. Comme de me trouver une nouvelle mutuelle ou d’essayer de faire comprendre que la radiation de mon ancien contrat santé n’est due qu’à leur incompétence, en répondant à une question cruciale quarante jours plus tard.

Et j’organise le back-up du déménagement en deux temps de Bradley. Et notre premier week-end en amoureux fin juin. Et nos premières vacances en amoureux fin juillet. Car mardi soir, la logistique bouclée, on a pu parler de nos échanges un peu vifs de la veille.

Bradley sur la défensive avec un ton factuel légèrement revêche, moi prête à lui rentrer dedans à sa première soufflette de cor de chasse dans mes oreilles, autant dire que l’on a fait tous les deux des efforts exceptionnels pour rester chacun dans nos cordes.

« Que les choses soient claires : je m’engage à t’offrir l’hospitalité le temps où tu seras SDF, une boîte postale pour ton renvoi de courrier temporaire, mes aptitudes de logisticienne pour ton déménagement et mes bras – petits mais costauds quand même – pour ce dernier et ce, quoiqu’il se passe entre nous. Je ferais de même si tu n’étais qu’un pote.

Mais si je m’engage dans ce projet de vie avec toi, j’ai bien dit ‘si’, cela ne veut pas pour autant dire que l’on doit emménager ensemble à une échéance déterminée. Aucun plan sur la comète, on voit venir, d’accord ? »

Il a acquiescé. Tenté tout de même de reprendre la main en soulignant qu’il me faisait presque une ‘fleur’ car il avait d’autres plans plus pratiques mais je suis restée stoïque et m’en suis allée en griller une à la fenêtre.

Et comme un ciel d’orage peut se déchirer d’un seul coup, il est arrivé dans mon dos et m’a enlacée en me susurrant : « Merci. Pour tout ce que tu fais pour moi. » Sans aucune transition, il est redevenu gracieux et charmant. Je n’ai pas relevé, je sais désormais que c’est sa façon à lui de signifier que l’incident est clos et qu’il n’en garde aucune rancœur.

Moi non plus, mais n’empêche, t’avise pas de me reparler comme tu l’as fait.

Puis, on s’est mis à égrener son planning ensemble, histoire de vérifier que l’on n’ait rien loupé. Et là, miracle.

–  Week-end du 12-13 juin ?

–  A l’armée. Mais je rentre le soir.

–  Week-end du 19-20 juin ?

–  J’ai les enfants, on part voir mon père.

–  Week-end du 26-27 juin ?

–  Rien.  

–  WHAT ?!!!???

Je me suis rassise, j’ai croisé les jambes et pris un air inspiré en le regardant droit dans les yeux. « Soyons clairs encore une fois : tout ça là, okay mais si l’on ne parvient pas à trouver un moment rien que pour nous, je ne vois pas l’intérêt de continuer. Alors le 26-27 juin, on décolle ! »

Un peu décontenancé par ma farouche détermination, il n’a cependant pas mis très longtemps pour accepter. Et donc, depuis hier, je chasse le week-end parfait. Entre mes envies, les siennes, la réalité de ces trop courtes 48 heures et celle de notre budget lui aussi trop court, bah je m’amuse.

Mais je vais trouver. Car ce n’est pas n’importe quel week-end, il s’agit de notre tout premier EVER ! A l’époque il y a 24 ans, on était fauchés et l’on n’est jamais partis en amoureux où que ce soit, même pour notre ‘voyage de noces’ où l’on était chaperonnés par mes parents…

Bref. Bichette Touring en action.

En parlant de voyages de noces, j’ai reçu il y a deux jours un message de Sean sur Facebook : « Coucou, je me suis remarié. Ça ne change rien à la vie passée ensemble et elle a entendu parler de toi, en positif bien sûr 😊 »

Ce à quoi j’ai répondu que j’étais très heureuse pour lui. Du coup, j’ai eu droit aux photos de mariage que j’ai regardées sans aucune pointe d’amertume. Paix et félicité.

« … Chaque grapillon de bonheur, fusse-t-il frêle, est bon à prendre. Le rire d’un enfant, le ronronnement d’un chat, les effluves vespérales de la campagne après une chaude journée d’été… Cela nourrit le cœur et l’âme et nous rend plus fort jour après jour… »

Le bonheur retrouvé d’un ex et sa petite pensée pour moi simultanément, c’est chouette. Et je prends tout ce qui est chouette en ce moment.

Et même si le temps s’annonce automnal ce dimanche, mon envie de pique-nique avec le Scoobigang ne se laissera pas déboulonner pour autant : pique-nique cuba-havana dans mon salon.

PAS DE LOMBRIC AU MENU

« Je n’ai pas du tout apprécié ton email. Je trouve que tu y vas un peu fort dans les insultes. Surtout, pas un moment tu t’es mise à ma place ! Qui est égocentrique, hein ? Et je ne t’ai pas demandé que tu passes tout ton week-end sur mon déménagement, je n’ai qu’un coup de fil à passer et j’ai un camion et des bras au départ et à l’arrivée. Si c’est pour en faire un tel patacaisse, je préfère me débrouiller seul. Donc non, on n’est pas si connectés que ça, finalement. »

Bradley en train de me beugler dessus hier soir à 23.25.

Mardi 18 mai 2021 # BALADE AUTORISEE AU-DELA DE 10km MAIS AVANT 19.00  J+16

Sa mauvaise foi, son interprétation de traviole et le fait qu’il n’avait donc pas besoin de moi m’ont faite brûler d’envie de lui raccrocher au nez. Mais les deux grammes d’alcool dont j’étais imprégnée à l’issue de mon apéro-geek avec Yang n’ont pu que me faire psalmodier des ‘OK’ bien monocordes.

La volée de bois vert passée, on a pu à peu près se parler comme des gens civilisés. Mais là aussi, mon alcoolémie avancée a tout passé à la moulinette. Et de la bouillie informe que sont mes souvenirs de notre conversation, j’en ai retiré ces quelques gros morceaux :

  1. Il passe ce soir, même si je n’en vois plus la finalité.
  2. Tous ses week-ends sont bookés, aucune possibilité d’escapade à deux comme je l’avais espéré et dont je voulais parler ce soir. Bis repetita de l’inutilité de sa venue ce soir.
  3. Son unique semaine de libre fin juillet au retour de sa grande mission dont il avait émis le souhait fût un temps d’en faire une semaine de vacances à deux pour me dire quelques temps plus tard qu’il l’envisageait en fait à deux mais dans sa maison à faire des travaux, doit m’être confirmée sous peu pour que je puisse poser mes CP au boulot mais si et seulement si c’est pour partir en vacances en amoureux parce que sa semaine de travaux, je m’en brosse le coquillard.

Et maintenant que je décante, je me rends compte que l’on n’aura jamais lui et moi ces instants privilégiés en amoureux qui sont à mon sens primordiaux pour contrebalancer le prosaïsme dont peut souffrir le quotidien d’une vie de couple. Sans les rendre omniprésents, ils doivent cependant exister. Et là, j’ai l’impression que cela ne sera jamais le cas.

C’est comme si on avait tiré un grand trait d’union de 20 ans entre nos deux histoires. Notre couple a repris sa course comme si de rien n’était avec son train-train, ses vicissitudes. Mais l’on a changé, j’ai changé. Et celle que j’étais alors n’a plus rien à voir avec celle que je suis aujourd’hui.

L’oiseau sur sa branche ne regarde certes pas plus loin que le bout de son bec mais s’il n’a que des graines de millet à se mettre dans le cornet tous les jours, il aura peut-être envie d’un bon lombric bien juteux de temps à autres pour faire passer la sobriété des graminées…

Bref. Plus ça avance et plus je recule. Je l’aime, ce Bradley, moins hier okay, et même s’il nous faudrait une bonne mise au point, il en faudrait peu pour que je m’engage vraiment auprès de lui, que je me sente investie. Que je descende de ma branche, quoi.

Là, je suis quasiment prête à m’envoler à tire-d’aile.

TOUCHE COULE

–  Bonjour Madame ! Pour vous remercier de votre fidélité à Bouygues Telecom, nous sommes heureux d’upgrader votre forfait internet mobile gratuitement !

–  Bah j’ai pas de smartphone.

–  Justement ! Comme vous êtes une excellente cliente, nous vous offrons le smartphone de votre choix pour 1 euro !

–  J’en veux pas.

–  Qu’est-ce qui vous retient ?

–  Je suis juste un dinosaure. Merci, au revoir.

 

Lundi 17 mai 2021 # BALADE AUTORISEE AU-DELA DE 10km MAIS AVANT 19.00  J+15

Pas allée au Normandy Beach ce Pont de l’Ascension. Le temps des plus hostiles, même pour la Normandie, ne m’inspirait pas vraiment. Si c’était pour rester cloîtrée dans ma chambre sans pouvoir mettre le museau et les pattes sur ma plage, bah je pouvais le faire chez moi.

C’est d’ailleurs ce que j’ai fait : jeudi roulage en boule en mode hérisson sur la banquette, vendredi traitement de ma paperasse perso et classement par le vide, micro-sortie samedi pour faire trois courses à côté et hier grand ménage à la Monk.

Le tout ponctué par mes nombreuses siestes. Et une seule séance de danse-gym sans grande conviction. Je ne sais pas trop pourquoi mais je ressens un grand état de fatigue ces derniers temps. Pas morale mais physique, une sorte de dodoïte aigüe. Je crois que je vais diminuer les doses de mélatonine, ça marche trop bien, ces cachets.

Mais en cours de journée hier, j’ai senti qu’il y avait aussi en fond une nouvelle crise de fibro à l’horizon très proche. Si proche qu’elle m’est tombée dessus ce matin en me levant au pied de biche. Moi qui étais gaie comme une écolière de retrouver ma chaise de bureau après ces quatre jours moribonds d’inactivité forcée…

J’ai mal partout. La lumière me tue les yeux, ma tête va exploser et j’ai l’énergie d’un paresseux paraplégique et dépressif. Mais pas le choix : j’ai gobé deux ibuprofène avec un guronsan et trois cafés comme au bon vieux temps du restaurant, et en voiture Simone !

La matinée a été sportive. Valait mieux, sinon je crois que j’aurais piqué du nez sur mon clavier ! Yep, débordée de taf comme la semaine dernière. Enfin ‘semaine’, disons les trois jours avant le Pont où j’ai eu l’impression de concentrer tout le taf que j’aurais dû abattre en ce bon mois passé à coincer la bulle.

Ils se sont enfin réveillés en me bombardant d’emails avec des tâches et des instructions en tout genre. Donc, mon premier boulot a été de séparer le bon grain de l’ivraie, c’est-à-dire de mettre de côté les laconiques du style « Voici ça et ça en prévision de ça. Allez, démerde-toi » et je me suis concentrée sur les urgences. Bien que personne ne serait mort si j’avais procrastiné un chouya.

Ils ont même réussi à me coller une migraine rien qu’à l’énoncé du sujet de ma première ‘conf-call’ vendredi. Mais bon, je ne vais pas me plaindre maintenant que j’ai un boulot digne de ce nom.

 

Dans deux jours, c’est la réouverture des terrasses. Certaines collègues me disent qu’elles ont déjà réservé leur table, bien déterminées à s’enfiler des mojitos jusqu’à… bah 21.00.  Je leur conseille de penser à la parka car il risque de faire frisquet et humide. Quelle ironie ! Moi, j’attends l’après-Toussaint pour aller boire des coups en terrasse en t-shirt débraillé.

En revanche, dans deux jours, je fête les 10 ans de mon arrivée dans cet appart. Le 19 mai 2011… C’était il y a une éternité ! Au moins une douzaine de vies vécues, une trentaine de réaménagements style home-staging la plupart à la force de mes petits bras, dix-mille péripéties enchaînées, des tonnes d’alcool et autant de larmes comme de rires…

Je l’aime, mon appart. Il me coûte cher, surtout depuis que je ne rentre plus la paie flamboyante que j’avais lorsque j’ai signé le bail mais bon, je ne le quitterai que contrainte et forcée. Quoique… Y a deux nuits, c’était l’apocalypse chez la voisine du dessus que je connais bien, Cindy. Des hurlements hystériques, des cavalcades, des objets qui tombent ou des bousculades contre les murs qui en ont fait trembler les cloisons chez moi…

Et rebelote hier, matin et aprem. J’ai appelé Monsieur Champomy, la pie de l’immeuble, qui a dû se rendre à l’évidence lorsqu’il a reçu un mail de son voisin d’à-côté qui lui aussi venait s’enquérir de la même chose. Pas évident d’intervenir, rien ne prouve qu’il y a violences conjugales et connaissant un peu Cindy qui est très gentille mais pas très stable dans sa tête, il se peut qu’elle ait fait une crise à son compagnon du moment comme elle l’a fait avec celui de l’époque il y a quelques années. Kevin et moi on s’était même demandé ce qui se passait. Mais l’absence de tuméfactions sur le visage de Cindy avait arrêté là notre inquiétude.

Je ne suis pas une pie, je prends des cachetons pour dormir et l’appart est très bien insonorisé, elle n’y est donc pas allée de main-morte dans la scène de ménage pour que je l’entende ! Bref. Hier soir, il y a bien eu une ultime cavalcade, la porte a claqué et depuis, c’est le silence. Je ne sais quoi en penser. Sauf que j’ai déjà du mal, moi, à avoir une petite vie rangée, ce n’est pas pour ranger celle des autres, toute altruiste et serviable que je suis.

Ma vie est une bataille navale en pleine guerre des missiles à Cuba. Autant dire que je ne m’ennuie pas. Surtout depuis le 26 mars !

La semaine dernière avait pourtant bien commencé avec effectivement le bouquet magnifique de Bradley et le très touchant gâteau d’anniv improvisé de Yang :

 

 

 

 

 

 

Les deux hommes qui comptent le plus pour moi m’ont comblée, j’étais aux anges.

Mais dès le lendemain, j’ai compris que l’univers allait rétablir sa balance en m’assénant un coup de massue derrière les oreilles : impossible de boire la moindre gorgée de vin ou de bière, gluten ou pas, sous peine de haut-le-cœur avec une boule à l’estomac…

J’ai réitéré le surlendemain et pareil. Comme si mon corps disait stop à mes frasques éthanoliques trop nombreuses à son goût ces derniers temps. J’ai décidé de l’écouter et m’en suis allée me déboucher un Coke Zéro.

Et juste avant de partir quatre jours en mission, Bradley m’a chargée d’organiser la logistique de son déménagement le 5 juin prochain. Il a un peu hésité, pour la forme, à me confier une telle tannée mais devant mes suppliques, il a abdiqué : « Stoplé, donne à Bibi ! C’est mon cœur de métier, ça ! Je te fais un truc aux petits oignons et on voit ça quand tu rentres, d’ac ? »

Donc, entre mes siestes et mes trucs perso, j’ai calé ça. En fait, ça m’a pris presque tout le week-end. Bradley m’a appelé une fois ou deux, sauf hier soir quand il était censé rentrer chez lui et récupérer ses enfants.

Et ce matin, ouverture des hostilités. N’ayant toujours pas de news, je lui ai envoyé un texto pour lui demander s’il allait bien et pour qu’il me rappelle dès que. Deux heures plus tard, je l’ai appelé et j’ai eu droit à un « Je te rappelle dans 5 minutes ! », cinq minutes qui se sont transformées en une heure pour donner lieu à un étrillage en bonne et due forme. Je l’ai rappelé à ma pause-déj mais il n’avait pas baissé d’un ton. Ça m’a soulée fortement. Alors, je lui ai pondu cet email :

Re

 Avant tout, je veux te redire que tu es un sale con. Dans ta bulle de stress, tu ne vois rien d’autre que tes emmerdes, incapable de voir ce que les autres, moi en l’occurrence, peuvent t’apporter de bien. 

 Tu as passé 4 jours difficiles et tu as une grosse merde à gérer aujourd’hui, la belle affaire ! même si je comprends que tu ne sois pas dans un bon état d’esprit. Mais peut-être que moi aussi j’ai passé 4 jours à la con et que je n’ai qu’une seule envie aujourd’hui, celle de m’enterrer vivante au fond d’un trou ?… 

 Et ce n’est pas pour autant que je t’ai sauté à la gorge, au contraire, j’aurais aimé que l’on se réconforte l’un l’autre, mais bon. Donc, ce n’est pas la peine de t’en prendre à moi quand tu es comme ça, de me parler comme tu l’as fait car c’est dégradant au possible, insupportable en fait. Je ne suis pas ton sous-fifre ni ton arpète et encore moins ton souffre-douleur. 

 Je t’aurais bien raccroché au nez en te disant de me rappeler quand tu aurais été dans de meilleures dispositions car je te cite « Parfois, il vaut mieux être seul pour mouronner tranquille sans faire chier les autres ». Mais l’urgence de la situation a fait que. Je le saurais pour la prochaine fois, je t’enverrai un pdf, ce sera plus safe (pour moi).

 Bref, je ne sais pas trop ce que je suis pour toi en ce moment à part un punching-ball et cela ne me plaît pas du tout. Il va peut-être falloir apprendre à gérer ta colère, en tout cas à savoir sur qui il ne faut pas que tu te défoules injustement. Ceux qui n’y parviennent pas, j’ai déjà donné et la finalité est moche.

 Tu veux que je m’implique, que je me projette avec toi, bah pas comme ça, en tout cas. Je ne pense pas t’avoir demandé grand-chose jusqu’à présent, si ce n’est, aujourd’hui, de faire attention à ne pas me parler comme à un chien et que si cela devait se reproduire, à savoir t’en excuser. 

Je peux encaisser beaucoup et je t’accepte comme tu es, tout lunaire, soupe-au-lait et despotique que tu puisses être parfois. Je te demande juste de mettre la pédale douce avec moi, de me respecter un tant soit peu car sinon, je ne vois pas notre avenir sous les meilleurs augures. 

Re-bref, viens me chercher demain soir au boulot, on voit les détails sereinement à la maison et on booke dans la foulée. Si c’est impossible pour toi de laisser tes garçons seuls une énième fois pour une paire d’heures, dis-le moi et… bah je t’envoie un pdf de la logistique de ton déménagement sur laquelle, cela dit en passant, j’ai passé quasiment l’intégralité de ce pont de l’Ascension. (moi qui étais contente de faire ça pour toi et impatiente de te débriefer!) 

 A+++

Sur ce, il m’a appelée. Là je me suis dit qu’il allait me sonner les cloches mais pas du tout, il tenait à s’excuser de ses propos blessants du matin.

–  Tu n’avais pas à subir mes foudres, tu n’y étais pour rien, c’était complètement déplacé de ma part. Je suis profondément et sincèrement désolé, je te prie d’accepter mes excuses.

–  Toi, tu as lu mon mail.

–  Même pas ! Pourquoi ?

–  Tu verras. Mais bon, oui, j’accepte tes excuses.

–  Tu m’intrigues…

–  T’inquiète ! Ça veut dire qu’on est connectés et ça, c’est chouette.

C’est chouette, oui, ça n’empêche qu’il y aura en ouverture demain soir une séance de remise à l’heure des pendules. Et s’il hausse le ton encore une fois, je lui claque le beignet. Forces spéciales ou pas, il ne me fait pas peur. Non mais.

Bref. Yang passe tout-à-l’heure dépanner mon ordi qui fait des siennes. Bien besoin du réconfort et du positivisme de mon BFF. Et apéro-geeks, je vais retenter la bière après sept jours d’abstinence… Amen (ène).